Vosges : les « patrons » de la Chambre de métiers face aux juges


ÉPINAL

justiceCompétente ? Sous diplômée ? Trop rémunérée ?…. Ces questions sont revenues sans cesse au cours du long procès qui a trusté toute l’audience du tribunal d’Epinal ce mardi.

La personne qui pose autant d’interrogations est une femme de 28 ans, embauchée par la Chambre de métiers des Vosges à l’automne 2012 en tant que conseillère de la direction générale, et ce après quelques mois de CDD. L’homme à l’origine de l’embauche n’est autre que le secrétaire général de la structure, Lionel Jeanmougin, 56 ans. Seulement voilà, cette embauche fait jaser au sein du personnel et cela a mené ces deux personnes devant les juges. Le secrétaire général pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêts. La jeune femme, elle, pour recel.

Tout a commencé lorsque la prévenue a été recrutée, sans qu’il y ait appel à candidature en interne, alors que la Chambre enquillait les déficits depuis trois ans. Mais sa légitimité à ce poste est aussi remise en cause. En charge de la communication via les réseaux sociaux, elle n’a aucune expérience professionnelle en la matière (elle était employée de boulangerie précédemment), ni les diplômes nécessaires (elle est titulaire d’un BEP-Vente). « Vous l’avez recruté de manière occulte, sans respecter la procédure, avec une surrémunération par rapport à ses aptitudes et ce que tou chent d’autres salariés de la chambre ayant des diplômes plus élevés et plus d’expérience professionnelle », lance le vice-procureur Vincent Légaut à l’attention de Lionel Jeanmougin, avant de déclarer qu’il y avait « au moins de l’amitié et de la proximité » entre les deux prévenus, mais sans pour autant affirmer qu’il existait un autre type de relation entre eux. Six mois de prison avec sursis et 20 000 € d’amende sont requis à l’encontre du secrétaire général, ainsi que trois mois de prison avec sursis contre la conseillère, toujours en poste.

Mais il reste un troisième prévenu sur lequel le vice-procureur ne se prononce pas. Cet homme, c’est Pascal Kneuss, le président de la Chambre de métiers, embarqué dans cette affaire pour avoir signé les CDD et le CDI de la jeune femme. Le parquet s’en rapporte à l’appréciation des juges, considérant qu’il avait fait preuve de négligence en signant ces contrats, mais qu’il n’y avait pas eu de sa part un quelconque intérêt à le faire. « Je n’ai pas été négligeant, mais trop confiant envers le secrétaire général », explique le président spinalien avant d’avouer que des salariés lui avaient tout de même fait part de leur colère par rapport à ce recrutement.

Pour Me Bentz, son avocat, Pascal Kneuss paie là « sa confiance absolue », envers Lionel Jeanmougin, qu’il connait depuis 23 ans. « Si un juge d’instruction avait été saisi du dossier, mon client aurait bénéficié d’un non-lieu » , assure Me Bentz tout en plaidant la relaxe. Une relaxe aussi sollicitée par Me Radius, avocate de Lionel Jeanmougin. Le conseil strasbourgeois affirme en effet que son client a procédé à cette embauche « dans les règles de l’art ». L’absence d’appel à candidature en interne ? « C’est seulement pour les maîtrises, les cadres et les cadres supérieurs. » Une rémunération trop importante ? « Elle correspond à la grille des emplois de la chambre… » rétorque Me Radius avant de lancer que « ce procès était dû à des rumeurs malsaines dignes de radio-moquette. »

Un avis partagé par Me Aachour, avocat de la conseillère. Pour le conseil alsacien, ce sont des dissensions internes qui sont aux sources de ce dossier, sans oublier « la lecture erronée par le parquet des statuts de la chambre. » Mais Me Aachour va plus loin en prétendant que certains salariés font payer à sa cliente ses origines turques. « Cette affaire a sali tous les prévenus. Et même s’ils viennent à être relaxés, les gens diront alors que les puissants sont protégés… » conclut Me Aachour.

L’affaire a été mise en délibéré au 10 mai prochain.

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