LA REUSSITE DE L’APPRENTISSAGE, ET SI ON FAISAIT VRAIMENT LE BILAN ?

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Le gouvernement sortant n’a eu de cesse de marteler ses chiffres sur l’apprentissage : 730 000 entrées enregistrées en 2021 par la Dares1, un record absolu. Elles étaient de 300 000 en 2017 et n’ont fait que progresser depuis (+140 % entre 2017 et 2021). Le stock de contrats d’apprentissage est quant à lui estimé à 900 000 à fin 2021 par l’OFCE, contre 419 000 en 2017 (+115 % en quatre ans).

Chaque bilan du quinquennat est l’occasion de confronter les satisfecit du gouvernement sortant à notre analyse CGT.

Ce quinquennat a démarré par une lettre de cadrage du ministère du Travail, visant à encadrer de façon contrainte et inacceptable la négociation nationale interprofessionnelle sur la formation professionnelle et sur l’apprentissage. L’ANI, non signé par la CGT, n’a pas été repris par Muriel Penicaud, qui a mis en place une réforme vantée comme un « big-bang » de la formation professionnelle et de l’apprentissage en 2018.

Lors des négociations interprofessionnelles la CGT n’a pas été entendue au sujet de sesrevendications visant à améliorer la rémunération et le statut des apprentis ainsi que lesconditions de travail des personnels des CFA. De leur côté, gouvernement et patronat sont parvenus à faire passer leur projet très régressif en matière d’apprentissage dans la fameuse loi dite « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » le 5 septembre 2018 :

  • Les branches professionnelles et les organismes de formation peuvent décider d’ouvrir et de fermer des Cela permet au patronat de faire correspondre l’offre en matière d’apprentissage à leurs seuls besoins. L’apprentissage, qui est bien toujours une voie de formation initiale risque de passer aux seules mains des entreprises.Celles-ci peuvent désormais créer leurs propres CFA et leur propre certification, sans aucune assurance que les apprentis sortants pourront valoriser la qualification acquisedans une autre entreprise. Un autre risque est de perdre le maillage territorial qui étaitassuré jusque 2018 par les régions ;
  • Les CFA sont désormais financés au nombre de contrats conclus dans leurs établissement (peu importe si les apprentis ont trouvé ou non un contrat de travail). Ils sont totalement soumis à la marchandisation. Les coûts des contrats sont fixés par France compétences sur recommandation des branches : risque de disparition des petits CFA, moins rentables mais nécessaires ;
  • Le contrat de professionnalisation et la formation professionnelle initiale sous statut scolaire sont désormais mis en concurrence avec l’apprentissage ;

1 https://1drv.ms/b/s!Av4FrhkpfuSjgrpxo4P6tOIbcNKdpA?e=AiSkvS

  • Les CFA sont désormais soumis aux mêmes règles juridiques que les autres prestataires de formation avec label qualité ;
  • Le système de contrôle et d’inspection de l’apprentissage ont été démolis.

 

Mais quel est le bilan réel ?

 

  • Un système dopé par des aides aux employeurs sans contrepartie

Pour rappel, depuis juin 2020 et la crise sanitaire, le gouvernement octroie une aide, qui devait être exceptionnelle, à tous les employeurs d’apprentis préparant un diplôme allant du CAP à la licence professionnelle – d’un montant de 5 000 euros pour les mineurs et de 8 000 euros pour les majeurs la première année d’apprentissage. Pour les entreprises de plus de 250 salariés, cette aide est conditionnée à la présence de 5% minimum d’alternants dans les effectifs de l’entreprise

Les auteurs de l’étude de l’OFCE2, publiée le 17 mars 2022, observent que 422 000 emplois d’apprentis auraient été créés en deux ans expliquant l’immense majorité des emplois créésdepuis 2019. La très forte baisse du taux de chômage, notamment le chômage des jeunes, reposerait donc sur une contribution très importante de l’apprentissage, lui-même dopé par un niveau de subvention atypique.

On peut vraiment se poser la question de la suite… Comment va évoluer la situation si lesaides exceptionnelles s’arrêtent – au 30 juin 2022 comme prévu à ce stade, ou à une dateultérieure comme l’a annoncé Emmanuel Macron ? « Les effets sur l’emploi dépendront alors dela nature des incitations engendrées par l’aide exceptionnelle », selon l’OFCE.

Les dernières données disponibles démontrent que les entreprises ne gardent pas le fruit de l’apprentissage qu’elles trouvent pourtant « formidable » puisqu’environ 50% d’apprentis ne conservent pas leur poste à l’issue de leur cursus pour être remplacés par d’autres apprentis et qu’environ 25% des contrats sont rompus avant leur terme, principalement au cours de la première année.

Les apprentis sont devenus de la main d’œuvre quasi gratuite pour les entreprises, qui préfèrent désormais embaucher des apprentis plutôt que des salariés en CDI ou en CDD, voire des stagiaires (ex : étudiants).

Pour la CGT, les aides massives à l’apprentissage ne doivent pas être versées au détriment de la formation et de l’embauche des salariés des entreprises, au détriment des jeunes en lycée professionnel et des autres dispositifs de formation. L’État et les organisations patronales ne cessent de se targuer de la réussite de l’apprentissage. Mais, si réussite il y a, elle n’est que quantitative, et elle n’est due qu’aux aides à l’embauche d’apprentis. Avant de décider de prolonger les aides massives à l’apprentissage, il aurait fallu évaluer leur impact sur la formation des jeunes, sur leur insertion et sur le budget.

L’apprentissage doit être choisi, ciblé et avec des engagements réels des entreprises qui y ont recours. Aujourd’hui, force est de constater que les apprentis ne représentent souvent qu’un chèque de 5000 ou 8000 euros…

2 https://1drv.ms/b/s!Av4FrhkpfuSjhpZRS-plzNc7IlhynQ?e=WbKXNr

 

– Un déficit abyssal de France Compétences et il ne reste plus rien pour former les autres salariés !

L’actuel système de financement des contrats en alternance, et particulièrement celui del’apprentissage, pèse très lourd dans le déficit de France compétences. Cela étant, ce n’est pas le système des coûts contrats en lui-même qui en est la cause, mais bien le fait que lenombre de contrats d’apprentissage a explosé. Il est d’ailleurs complètement irresponsable de se fixer comme objectif de développer fortement l’apprentissage tout en se refusant d’augmenter le taux de la taxe d’apprentissage. Ce serait la première des choses à faire, sans oublier que l’Etat lui-même pourrait jouer un rôle à cet égard puisque l’apprentissage,même libéralisé à outrance, reste une voie de formation professionnelle initiale. Hors de telles orientations, point de salut car une baisse drastique des coûts contrats ne seraitévidemment pas la bonne solution. En 2021, les dépenses pour l’apprentissage ont atteint près de 9 milliards

 d’euros, soit 3 fois plus qu’une année de collecte de la taxe d’apprentissage (environ 3milliards). Sans augmentation des recettes, ces dépenses considérables ne peuvent se faire qu’au détriment d’autres dispositifs.

 

–  Une concurrence déloyale entre CFA et lycées professionnels

Le financement au coût contrat et la suppression de l’autorisation administrative préalablede la région pour ouvrir des sections d’apprentissage favorisent les CFA des grands secteurs, privés, et au contraire pénalise les plus petits CFA dans les zones rurales ou les quartiersdéfavorisés pourtant indispensables à la réponse aux besoins de formation dans ces zones. Il conduit les CFA à se spécialiser sur les métiers qui attirent les jeunes, au détriment de la diversité de l’offre.

La meilleure façon de maîtriser les dépenses de l’apprentissage serait de maîtriser ledéveloppement global de l’apprentissage et de redonner aux lycées professionnels (service public de l’éducation professionnelle initiale) une place centrale dans le développement des formations professionnelles.

La progression de l’apprentissage s’effectue en grande partie au détriment de la voie scolaire. Il faut revenir à un équilibre entre les deux voies de formation professionnelle initiale = apprentissage et lycée professionnel.

Le discours récurrent sur l’apprentissage consistant à le présenter comme la voie « royale »avec 70% des jeunes ayant emprunté cette voie qui accéderaient à l’emploi doit être pondéré par le poids de la sélection à l’entrée, les taux de ceux qui poursuivent leurs études et les taux de rupture qui ne sont jamais pris en compte dans les chiffres !

A la différence des lycées professionnels qui ne choisissent pas leurs élèves, les employeurs choisissent leurs apprentis. Même dans les cas où le jeune est présenté par le CFA, c’estl’entreprise qui décide de signer, ou pas, un contrat avec le jeune. Les risques de traitement différencié voire discriminatoire sont latents.

Une enquête du Cereq3 conforte ce que pense la CGT et relève la part d’inconnu qui pèse sur »le nombre de candidats et de candidates potentiellement intéressé(e)s par l’apprentissage qui ne parviennent pas à signer de contrat » et qui se replient pour beaucoup vers les lycéesprofessionnels.

3 https://www.cereq.fr/garcons-et-filles-en-apprentissage

 

La dynamique de l’apprentissage a fait de l’ombre à l’enseignement professionnel. Le risque de cette réforme est que le lycée professionnel devienne « un réservoir de places deformation, chargé de s’adapter à la réalité d’un marché de l’apprentissage, peu contrôlé et peu maîtrisé par les pouvoirs publics », selon l’ouvrage du Cereq.

 

–  Un système loin de se concentrer sur le premier niveau de qualification, sur les jeunes les plus fragilisés face à l’emploi

Dans le rapport de l’OFCE est pointé le fait que la réforme n’a pas eu d’effet sur l’insertion des jeunes sortis prématurément du système scolaire sans diplôme ni qualification. Aucontraire, loin de faire mieux que l’école, il accentue les inégalités d’accès à la formation aux qualifications ouvrière et d’employé(e).

« C’est pour ces jeunes que l’apprentissage est la solution d’insertion professionnelle la plus décisive, mais la réforme de 2018 n’a eu aucun effet sur eux », estiment les auteurs. L’étude appuie ces propos sur l’évolution du nombre d’entrants sans diplôme qui est « en 2020 seulement +5,9 % plus élevé qu’il ne l’était en 2018, alors que le total des entrées en apprentissage a fait un bond de +63,7 % ».

« Loin de se concentrer sur le premier niveau de qualification, sur les jeunes les plus fragilisés face à l’emploi, l’apprentissage favorise ceux et celles les plus armé(e)s pour obtenir un diplôme et s’insérer sur le marché du travail. »

La question se pose également de l’utilisation de l’apprentissage comme un moyen de limiter les situations de pauvreté auxquelles est confrontée la population étudiante et ce d’autant plus avec la crise sanitaire.

De plus, le Cereq vient contrebalancer le discours ambiant sur la revalorisation de cette voiede formation et fait état d’une réflexion sur l’évolution de l’apprentissage et des apprentis au fil du temps : « Fer de lance des politiques en faveur de la jeunesse, l’apprentissage laisse pourtant peu de place aux apprentis. L’importance des enjeux politiques a eu tendance à davantage valoriser et mettre en lumière l’ensemble du dispositif institutionnel et ses évolutions réglementaires plutôt qu’à s’attacher aux réalités sociales des publics concernés. »

Partie du constat qu' »aucune enquête statistique ne permet, en France, de connaître le nombre de jeunes recalés de l’apprentissage », une chercheuse a dirigé une enquête menée entre 2015 et 2017 pour comparer les apprentis et les lycéens professionnels en première année de CAP ou de baccalauréat professionnel de 39 établissements.

Résultat : « 30 % des élèves de lycée professionnel sont des jeunes évincés de l’apprentissage ». « Loin d’accueillir les élèves dont l’école ne veut plus, l’apprentissage introduit en fait unnouveau sas de sélection déplacé en amont même de la formation », analyse la chercheuse. L’auteure dénonce « la sélection opérée à l’entrée du dispositif, évinçant ainsi les filles, lajeunesse paupérisée ainsi que ceux et celles dont l’histoire est marquée par un passémigratoire ».

 

– Une dimension d’émancipation oubliée

Autre critique formulée par les chercheuses du Cereq : l’absence d’ambition éducative de la réforme. « Centrés sur la dimension de l’emploi, plutôt que sur les

4 https://analyses-propositions.cgt.fr/la-jeunesse-face-aux-consequences-du-covid

perspectives qu’ouvre l’apprentissage d’un métier, les contenus de formation — tels qu’ils sont envisagés aujourd’hui dans la réforme de la voie professionnelle — tendent à réduire la culture professionnelle à l’inculcation de dispositions sociales et à une socialisation à l’esprit d’entreprise ». Les auteures appellent à un retour à la « dimension culturelle » del’apprentissage pour permettre aux apprentis de devenir, aussi, des citoyens.

« L’abandon des ambitions éducatives et la disqualification de l’enseignement au métier, participent d’une ‘désouvriérisation’ de l’apprentissage, concluent les deux auteures. Ce processus entraîne une amnésie, celle des acquis de l’éducation populaire, des projets d’éducation tout au long de la vie et des réflexions critiques du mouvement ouvrier français ou des intellectuels d’après-guerre considérant que l’apprentissage ‘méthodique et complet’ avait aussi une dimension culturelle, celle de faire de l’apprenti ‘un ouvrier parfait’ comme de former ‘l’homme (et la femme), le travailleur, le citoyen. »

Si le gouvernement sortant peut se vanter d’un bilan quantitatif en matière d’apprentissage, la réalité est toute autre lorsque l’on mesure les effets dévastateurs de la libéralisation de l’apprentissage. Nos revendications pour le service public de l’éducation et pour un servicepublic de l’emploi et de la formation professionnelle sont plus que jamais d’actualité.




Tous nos voeux !




CHRONIQUE D’UN BOYCOTT ANNONCÉ

 

En novembre 2020, quatre ans après l’arrivée de la nouvelle équipe d’employeurs élus à la tête du réseau des chambres de métiers et ses beaux discours sur la nécessité de mettre en « chantier » la question des salaires, le collège employeur présentait aux représentants des agents de CMA le rapport final d’un audit sur les rémunérations réalisé par le cabinet Arthur Hunt.

En synthèse, ce rapport met en exergue :

  • Des niveaux de rémunération située globalement 20 % sous le marché pour les cadres et 13 % sous le marché pour les non-cadres.
  • Des dispositifs d’avancements équitables mais trop lourds à gérer et peu différenciants.
  • Un dispositif de primes n’ayant qu’une fonction de reconnaissance, les montants étant insuffisants pour rémunérer. Absence de règles et peu de capacité du management à apprécier et objectiver.
  • Avancement à l’ancienneté non différenciant et utilisant une enveloppe conséquente du budget.
  • Absence de CE, d’épargne salariale

Fort de ce constat, le collège employeur a pris l’initiative, en accord avec les partenaires sociaux, de mettre en place un groupe de travail spécifique pour étudier et trouver les « fameux » leviers censés atténuer les effets de la non-revalorisation de l’indice statutaire. On pouvait dès lors penser que de réelles solutions sur le volet des rémunérations allaient enfin pouvoir voir le jour. Du discours des présidents, semblait naître un espoir.

L’aboutissement au bout de seulement deux réunions de travail est tout bonnement consternant !

Le SNCA quant à lui à fait en séance des propositions d’évolution des carrières, sérieuses et complètes. Balayées d’un revers de la main.

Un résumé de la situation et de nos propositions ici

Lors de la dernière CPN56 de juin, probablement pour essayer d’apaiser la colère montante du collège salarié, le collège employeur a proposé d’ajouter à leurs micromesurettes, le déplafonnement de l’échelons 6 en le passant de 4 à 2 ans. Sur le reste, les présidents sont restés fermes ; de l’aveu même du collège employeur, il ne pourra être question de revalorisations généralisées de quelque nature que ce soit.

La montagne accouche d’une souris.

Pour le SNCA-CGT le compte n’y est pas ! En 15 ans, le SMIC a augmenté de plus de 24 %, l’inflation de 19.30 %; pendant la même période la valeur du point d’indice n’a évolué que de 4.20 %. L’appauvrissement des agents est incontestable.

Pour le SNCA-CGT la revalorisation salariale reste un sujet central et la cure d’austérité n’a que trop duré. L’aboutissement des pseudo-négociations sur le volet des rémunérations est un véritable échec et les personnels ont fait suffisamment d’efforts.

La coupe est pleine, on se paie notre tête et a fortiori celle des personnels des chambres de métiers et ça c’est intolérable.

Devant l’attitude inflexible du collège employeur, le SNCA-CGT ne cautionnera pas, par sa présence en CPN 52, la paupérisation des agents et décide de boycotter la CPN52. 

Le SNCA-CGT en a informé la présidence de la CPN52 par courrier.

BOYCOTTER, POUR QUOI FAIRE ?

Depuis 12 ans, les agents des Chambres de Métiers et de l’Artisanat ont joué le jeu. Après la réforme du statut en 2009, que la CGT avait refusé de signer, nous avons bien senti le danger qui nous guettait. Le paritarisme consulaire, bicamériste avec une instance de négociation (la CPN56) et une autre de validation (la CPN 52) porte en soi les ferments d’un dialogue social biaisé pour deux raisons.

La première c’est que de paritarisme il n’y a pas puisque la CPN52 compte un nombre impair de membres (un comble pour une instance paritaire) avec en son sein la présence d’un représentant de notre ministère de tutelle dont vous imaginez bien à qui va le soutient.

La deuxième c’est que la CPN56, qui était avant 2009 un véritable espace de négociation (présidence tournante et possibilité de statuer sur les atteintes au statut) est devenue une chambre d’enregistrement des seuls projets patronaux.

Ajoutons à cela le caractère ectoplasmique et décoratif des Commissions Paritaires locales, qui n’ont aucune marge de manœuvre pour obtenir des avantages locaux, et vous avez le tableau complet de la supercherie du dialogue social dans les CMA.

Nous pourrions nous accommoder de cette faiblesse démocratique structurelle dans notre réseau si nous étions capables d’instaurer un réel rapport de force entre partenaires sociaux. Mais ne nous voilons pas la face et appelons un chat un chat, les agents de CMA mobilisent peu quand il s’agit de faire grève.

Du pain béni pour les patrons qui ont bien compris qu’ils pouvaient se permettre beaucoup de choses et que les agents ne bougeraient pas ou très peu. À la CGT, syndicat de combat, nous le déplorons mais nous devons regarder les choses en face.

Alors que nous reste-t-il ? Comment faire avancer les intérêts des agents ? Devons-nous nous contenter, comme pour la tentative de réforme de l’Annexe X, de nous battre sans relâche pour ne pas régresser ?

Quels progrès pour les agents ?

Car enfin qu’avons-nous obtenu depuis 12 ans ? Quel agent de CMA pourrait citer un progrès notable pour l’ensemble des collègues ? Car il s’agit bien de cela : avancer collectivement. Les patrons ont bien, compris qu’en jouant la carte de l’individualisation (la gueule du client en bon français) ils faisaient taire à bon compte le mécontentement dans cette société individualiste.

Le bilan est donc lourd. Le gel de la valeur du point, belle invention de notre ministre de tutelle, au nom de contraintes budgétaires toujours renouvelées, nous a fait perdre énormément de pouvoir d’achat. La comparaison avec la progression du SMIC sur 12 est ahurissante. Et la réponse aux demandes de revalorisation de la valeur du point faites par la CGT est toujours la même : « demandez à l’état, nous, on ne peut pas ». Ce vilain état qui selon les patrons coûte si cher en charges mais dont on n’oublie pas de prendre les aides solidaires, en cas de crise sanitaire par exemple. Aides qui seront financées un jour ou l’autre… par l’impôt que les classes moyennes, au bout du compte, finiront par assumer. Solidarité oui, mais que quand je suis concerné.

Un cycle infernal

Devant la colère des organisations syndicales face à ces refus systématiques est toujours calmée par une ou deux mesurettes, catégorielles et très limitées, qui satisfont une partie des OS. Pas nous.

Ce jeu à deux (je demande, tu dis non, je te propose une miette, je dis c’est mieux que rien et j’accepte) devient un jeu pervers, un cycle infernal.

Comme nous le disons souvent, accepter de perdre une main après négociations alors que l’on voulait nous couper un bras, n’est en rien une victoire. Certains pourtant s’en contentent à défaut de s’en réjouir.

La CPN52, que nous avons docilement suivie et respecté n’a servi qu’à faire passer les réformes nécessaires aux CMA et à l’état pour la régionalisation du réseau. AUCUNE des demandes des OS n’a été seulement examinée.

Cela suffit !

Quand la CGT propose de faire cesser ce jeu de dupes, de sortir de ce cercle vicieux, certaines organisations disent « il ne faut pas rompre le dialogue social ».

Pourtant, la seule fois où nous avons fait plier les patrons, lors de la réforme de l’annexe X, c’était en rompant le dialogue social et en boycottant la CPN56. Certains patrons, peut-être même certains ministres, ne nous le pardonneront jamais. Et c’est tant mieux.

Le boycott à quoi ça sert, donc ?

Ça sert avant tout à dire stop à un système, à ne plus s’en rendre complice, à changer la donne.

Ça sert à se faire respecter. Ça sert à sonner un signal d’alarme. Ça sert à dire « ça suffit ! »

La CGT une fois de plus proposera aux autres OS de refuser de siéger en CPN52 tant que nous ne mettrons pas à plat collectivement et par la revalorisation de la valeur du point les rémunérations des agents.

Nous souhaitons l’union. Nous souhaitons une réponse unanime des OS pour sortir de cette impasse insupportable.

Et la CGT prendra ses responsabilités. Elle n’ira pas en CPN52 même si elle est seule à le faire.

À ceux qui continueront à jouer à ce jeu de dupe sans issue, par paresse, faiblesse ou mollesse, de prendre les leurs.

 




ALAIN GRISET, « ni exact, ni sincère »

La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a indiqué ce mardi avoir saisi la justice du dossier du ministre délégué aux PME Alain Griset, pour « omission substantielle » d’une part de son patrimoine et soupçon d’ »abus de confiance ».

 

 


C’est donc deux enquêtes qui sont ouvertes à Paris et Lille, sur les comptes bancaires de celui qui fut le président de CMA France.

« Les déclarations de situation patrimoniale et d’intérêts de Monsieur Griset » ne sont « ni exactes, ni sincères », selon la Haute autorité pour la transparence de la vie publique. Le parquet de Paris a annoncé l’ouverture de deux enquêtes.

 

Alain GRISET, que les agents des CMA connaissent bien pour avoir été l’artisan de leur malheur en gelant la valeur du point de leur indice, voici 10 ans est rattrapé par les affaires. On entend d’ici le concert de casseroles qui s’annonce, et si Monsieur Griset ne reste pas ministre (on peut douter de son départ, tant la Macronie s’accommode facilement des mises en examen) qu’après avoir été taxi, il pourra se reconvertir dans la quincaillerie et les arts ménagers.

Certes la somme semble,  modeste, et tout cela sera bientôt réparé. Sans doute.

Certes. Mais il y a le principe, l’exemplarité, le passé et le contexte.

Contexte et passé car si ce personnage haut en couleurs (brillant par ailleurs, tant il maîtrisait les dossiers) se distingue aujourd’hui par sa capacité à escamoter à la haute autorité pour la transparence de la vie politique,  une partie de son patrimoine , il s’est aussi illustré par la rigueur qu’il imposait…aux autres. Et voilà aussi pour le principe et l’exemplarité.

Gageons que sa défense sera, comme tous les mis en cause autour du Président Macron : 1) j’assume, 2) c’est un oubli, 3) je vais rectifier, 4) j’étais de bonne foi.

Arrivé dans la cour des grands, Alain Griset s’est vite adapté mœurs du personnel politique d’aujourd’hui. Certains hauts fonctionnaires, certains ministres parfois, semblent frappés d’une curieuse maladie, (pas virale celle-ci) dont le principal symptôme est la perte de mémoire. Sélective tout de même, puisqu’elle ne touche que le souvenir du patrimoine de ceux qui en sont affectés. A moins que, étant scandaleusement riches, ils considèrent certains biens comme quantité négligeable. Des biens que le commun des mortels ne verra dans doute jamais dans une vie. Et cela, c’est peut-être encore plus détestable et inquiétant qu’une hypothétique amnésie sélective.

Or donc, voici ce grand commis de l’état, ce serviteur inaltérable de l’artisanat, arrivé au plus haut de ce que l’on peut rêver dans une carrière, trébuche sur la dernière marche du panthéon politique pour une toute bête question de petite monnaie. Comme un vulgaire gamin qui se serait fait prendre la main dans le pot de confiture. Quel dommage !

Et que va-t-il se passer maintenant pour notre ministre ? Rien dans doute.

Si vous ne nous aviez pas imposé une austérité inutile Monsieur Griset, si vous ne nous aviez pas montré le visage d’un homme qui refuse de s’appliquer à lui-même les exigences qu’il impose à ceux qu’il considère comme étant au-dessous de lui, nous aurions pu comprendre.

Mais en plus de ce petit faux pas, vous nous avez montré tout le mépris que vous aviez du dialogue social et des instances en refusant dernièrement de signer la parution au JO d’un article, pourtant négocié officiellement dans nos commissions paritaires nationales, parce qu’il vous déplaisait. Piétinant ainsi négligemment le dialogue social, vous moquant totalement des présidents de CMA élus, vos ex collègues, et, mais cela c’était habituel pour vous, des représentants élus des agents.

Fort heureusement vous vous êtes faut taper sur les doigts et vous avez fini par rentrer dans le rang.

Voilà pourquoi nous ne nous réjouirons pas des embarras de notre ministre de tutelle.

De là à ne pas en sourire un peu….

 

Alain Griset, ministre délégué aux PME visé par deux enquêtes judiciaires

 

 

 

 




Loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19

La loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 a été adoptée par le Parlement dimanche 22 mars 2020.

 

Cette loi prévoit entre autre la création d’un état d’urgence sanitaire, et des modifications du code du travail et de la sécurité sociale, renvoyées à des ordonnances ultérieures.

Elle prévoit également un ensemble d’autres mesures concernant les élections municipales, lesloyers, les reports de paiement des cotisations sociales qui sera repris dans une note ultérieure.

I- L’état d’urgence sanitaire Articles 2 et suivants

Pour faciliter la présentation les articles sont présentés sous forme de plan :

  • Qu’est-ce que l’état d’urgence sanitaire ?

La loi d’urgence pour faire face à la crise du Covid-19 crée, de toute pièce un régime juridique d’état d’urgence sanitaire. Cet état d’urgence sanitaire n’a jamais existé auparavant. Il existe une loi de 1955 sur l’état d’urgence, mais elle n’est pas particulièrement prévue pour les cas de crise sanitaire. Elle était plutôt utilisée pour des évènements portant atteinte à la sécurité publique (attentats, guerre d’Algérie, émeutes urbaines…).

 

Déclarer l’état d’urgence permet de prendre des mesures particulièrement restrictives des libertés individuelles et publiques sans passer par les procédures habituelles, notamment le Parlement.

 

Il faut distinguer deux choses : la création du régime juridique de l’Etat d’urgence sanitaire et la mise en place concrète de l’état d’urgence aujourd’hui pour le Covid-19.

 

  • Quelles mesures permettent de prendre l’état d’urgence sanitaire ?

 

La loi d’urgence crée de nouveaux articles insérés dans le code de la santé publique. Ces articles prévoient que dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire il est possible de :

 

  • restreindre ou interdire la circulation des personnes et véhicules,
  • interdire aux personnes de sortir de leur domicile sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux et de santé,
  • ordonner des mesures de mise en quarantaine des personnes affectées par le virus,
  • ordonner des maintiens à l’isolement,
  • ordonner la fermeture provisoire d’établissements recevant du public, sauf les établissements fournissant des biens ou des services de première nécessité,
  • restreindre les rassemblements sur la voie publique ainsi que tout type de réunions,
  • réquisitionner des biens et services « nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire »,
  • et réquisitionner des personnes nécessaires au fonctionnement de ces services et à l’usage deces biens. On ne sait pas bien ici s’il s’agit juste des personnels de santé et de police ou tout type de personnels liés aux besoins essentiels des populations (distribution alimentaire par exemple),
  • instaurer des mesures temporaires de contrôle des prix de certains produits nécessaires,
  • instaurer des mesures nécessaires à la mise à disposition des médicaments aux patients,
  • instaurer toute autre mesure limitant la liberté d’entreprendre.

 

  • Prérogatives renforcées de l’exécutif, rôle mineur du Parlement a- Déclaration de l’état d’urgence

La loi d’urgence prévoit que l’état d’urgence soit déclaré par décret pris en conseil des ministres. Le rôle du Parlement est réduit à la portion congrue. Celui-ci est simplement informé de la déclaration de l’état d’urgence et des mesures prises, et peut simplement requérir des informations complémentaires.

 

Un comité scientifique est constitué et ces avis sont rendus publics.

 

L’état d’urgence peut être déclaré par décret pour un mois. A l’issue de ce mois, le Parlement retrouve son rôle et seul une loi peut décider de prolonger l’état d’urgence.

Cependant, dans le cas présent du Covid-19, la loi d’urgence prévoit qu’exceptionnellement l’étatd’urgence est déclaré pour deux mois. Au bout de ces deux mois, seule une loi pourra le prolonger.Le gouvernement a donc tout pouvoir de restreindre les libertés pendant deux mois entiers.

Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat n’interviennent à aucun moment, tous les contre-pouvoirs au gouvernement sont donc écartés pendant l’état d’urgence.

 

b- Mise en œuvre des mesures

 

Pendant la période d’état d’urgence, l’ensemble des mesures listées dans le petit 2 sont prises par le Premier ministre. Une partie des mesures réglementaires et individuelles qui en découlent sont prises par le ministre de la santé.

 

Mais il est également possible sur habilitation du Premier ministre ou du ministre de la santé de déléguer la prise de ces mesures aux préfets de département. Les préfets pourraient donc prendre seuls des mesures particulièrement attentatoires aux libertés !

Le Parlement n’a aucun rôle en la période.

 

  • Les sanctions

 

Le fait de ne pas respecter les réquisitions est puni de 6 mois de prison et 10000 euros d’amende. Voilà qui permet d’empêcher toute rébellion y compris si les réquisitions se font dans un cadre qui ne respecte pas la protection de la santé des personnels !

Ces sanctions existaient déjà mais étaient limitées aux personnels de santé. Ici il semble que cela peut concerner toute réquisition pour « lutter contre la catastrophe sanitaire », or on ne sait pas si cette expression recouvre uniquement le domaine de la santé et de la police ou tout type de réquisitions.

 

Le fait de ne pas respecter toutes autres obligations (confinement, interdiction de circulation, etc.) est passible d’une contravention de 4ème classe, soit 135 euros. En cas de récidive dans les 15 jours, amende de 5ème classe soit 1500 euros.

 

Ce régime juridique a vocation à subsister jusqu’au 1er avril 2021. Les règles ici prévues nes’appliqueront plus lorsque l’état d’urgence aura pris fin, mais elles ne seront pas pour autant supprimées du code de la santé, elles pourront être réutilisées à chaque fois que l’état d’urgence sanitaire sera à nouveau déclaré par décret. Ce régime juridique ne disparaitra complètement du code de la santé publique que dans un an.

 

II-      Les mesures relatives au droit du travail et de la sécurité sociale Article 8

Suppression des jours de carence pour tous les arrêts maladie débutant à compter de la date de publication de la loi, et jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire. Et ce, pour tous les assurés sociaux du régime général et du régime agricole, ainsi que pour les fonctionnaires, les militaires et tous ceux qui relèvent de régimes spéciaux de la sécurité sociale (marins, SNCF, banque de France, énergie électrique et gaz…). Il semblerait que cela soit valable quel que soit l’arrêt maladie (pour cause de covid-19, pour arrêt non causé par le covid-19, pour garde d’enfants…).

 

Article 11 b

 

Le texte de loi adopté autorise le gouvernement à prendre dans un délai de trois mois (ce qui parait bien long vu l’urgence) des ordonnances qui pourront, si nécessaire, entrer en vigueur le 12 mars, afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de l’épidémie de covid-19 et aux conséquences des mesures prises pour limiter cette propagation, et notamment afin de prévenir et limiter la cessation d’activité ainsi que ses incidences sur l’emploi.


La possibilité de faire entrer en vigueur les mesures dès le 12 mars signifie que les ordonnances pourront être rétroactives, et valider a posteriori certaines actions.

 

Cette rétroactivité nous arrange sur les indemnités journalières de sécurité sociale qui pourront être rémunérées à hauteur de 90% du brut dès le 12 mars pour tous, mais cela signifie également que l’imposition par l’employeur de jours de RTT, de compte épargne temps et de jours de repos des forfaits jour, avant que cette loi ne soit votée deviennent subitement légaux alors que c’était illégal.

 

  • Adaptation du dispositif d’activité partiel, pour faciliter et favoriser son recours. Par rapport au projet initial, il est rajouté la possibilité d’adapter de manière temporaire le régime social applicable aux indemnités versées dans ce cadre (sans que cela soit précisé, on imagine que ça prendra la forme d’exonération de cotisations).

 

-L’indemnité complémentaire journalière de la sécurité sociale prévoit des IJSS à 90% du salaire brut, mais uniquement pour les travailleurs qui ont plus d’un an d’ancienneté. Les ordonnances vont certainement supprimer cette condition d’ancienneté. On ne sait enrevanche toujours pas si les salariés qui n’ont jamais droit à ces 90% vont pouvoir en bénéficier: intérimaires, saisonniers, travailleurs à domicile et intermittents. La loi ne précise pas quelles seront les adaptations.

 

  • Congés payés : si un accord d’entreprise ou de branche l’autorise, l’employeur pourra imposer ou modifier les dates d’une partie des congés payés dans la limite de 6 jours ouvrables, en dérogeant aux délais de prévenance et modalité de prise des congés. Le projet initialn’imposait pas la signature d’un accord, et ne limitait pas les congés payés qui pouvaient êtreimposés à 6 Le texte est donc plus protecteur en l’état même si c’est toujours un recul des droits des salariés.

 

Lors des débats parlementaires, plusieurs amendements ont proposé d’inscrire dans la loi la limitation dans le temps de la validité de ces mesures, pour qu’elles ne puissent pas être utilisées au-delà de la période d’épidémie.

La Ministre du travail a refusé tous ces amendements en prétendant qu’une telle précisionn’était pas nécessaire dans la mesure où ces dispositions seraient, par nature limitées à la période de crise sanitaire.

Il faudra donc être vigilant sur le risque de pérennité de ces mesures faisant reculer les droits des salariés, d’autant plus que le mot « provisoire » qui figurait dans le projet de loi initial, a été supprimé sur projet de loi adoptée.

 

Si d’autres organisations syndicales se lançaient dans la signature de tels accords, qui constituent un recul des droits des salariés, les camarades devront peser à minima sur le faitque ces accords soient expressément limités dans le temps, à la période liée à la crise sanitaire.

 

  • jours de repos imposés : possibilité pour l’employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates de certains types de jours de repos dont bénéficient les salariés (RTT, des jours de repos prévus dans la convention de forfait, jours de repos affectés sur le compte épargne temps (CET)).

 

Aujourd’hui si l’accord ou la convention collective ne le prévoit pas expressément, les employeurs n’ont pas le droit d’imposer unilatéralement la date des RTT, jours de CET et de repos forfait jours, et doivent respecter les éventuels délais de prévenance prévus par l’accord.

Suite aux ordonnances, l’employeur n’aura pas à respecter de délai de prévenance. Le projet initial ne concernait que les RTT et les jours affectés sur le CET. Les jours de repos des salariés en forfait ont été rajoutés.

A noter que l’article de loi vise également la fonction publique !

 

  • dérogation aux règles relatives à la durée du travail et aux repos : dans les secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation ou à la continuité de la vie économique et sociale, l’employeur pourra déroger aux règles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos

Mesures particulièrement dangereuses… Pas de précision sur la liste de ces secteurs.

 

Les règles de droit de l’Union européenne sur les durées maximales de travail ne sont pas particulièrement protectrices en la matière et ne constituent donc pas un filet de protection très efficace. Elles prévoient que la durée moyenne du travail sur 7 jours ne doit pas dépasser 48h.

Sur le droit au repos, elles prévoient que les Etats doivent garantir une période de repos de 35heures (24+11) sur une période de 7 jours. Malheureusement, la directive prévoit également que le repos peut être réduit à 24h si les conditions objectives, techniques ou d’organisation du travail le justifient.

 

  • intéressement et participation : les ordonnances pourront modifier les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation. Cela peut retarder le versement de ces sommes pour les salariés.

 

  • Prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (dite prime Macron). La loi prévoit de modifier la date limite et les conditions de versement de cette prime. La condition de mise en place d’un accord d’intéressement pourrait être supprimée et la date butoir du 30 juin 2020 (qui est prévue par la loi 2019-1446 du 24 décembre 2019) pourrait être repoussée.

 

Ce mode de rémunération présente des effets néfastes. Les sommes versées étant partiellement exonérée de cotisations sociales, ce dispositif nuit au financement de la protection sociale. Néanmoins, dans la mesure où ce dispositif permet de verser des primes aux salariés à moindre coût, il est fortement incitatif pour les employeurs.


-Élections TPE. La loi prévoit d’adapter l’organisation du scrutin permettant de mesurer l’audience dans les TPE. Les dates du scrutin prévu du 23 novembre au 6 décembre 2020 seront probablement repoussées. La définition du corps électoral pourra être modifiée si nécessaire pour tenir compte des nouvelles dates, on ne sait pas ce qu’ils entendent par là.

Comme la désignation des conseillers prud’hommes et des membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI) s’appuie sur l’audience syndicale et patronale, la durée de leurs mandats pourra être prorogée en conséquence.

 

-Médecine du travail. La loi prévoit d’aménager les modalités de l’exercice de leurs missions par les services de santé au travail de leurs missions. Il s’agit notamment du suivi de l’état de santé des travailleurs. Il s’agit également des règles selon lesquelles le suivi de l’état de santé est assuré pour les travailleurs qui n’ont pu, en raison de l’épidémie, bénéficier du suivi prévu par le même code.

Cette mesure appelle la plus grande vigilance quant au risque de pérennisation d’un allégement des obligations de suivi de l’état de santé des travailleurs.

 

Signalons que l’instruction DGT du 17 mars 2020 relative au fonctionnement des services de santé au travail pendant l’épidémie de Covid-19 a déjà prévu la possibilité pour le médecin du travail de reporter toutes les visites médicales, sauf lorsqu’elles sont indispensables. Pour lessalariés dont les activités sont essentielles à la continuité de la vie de la Nation, les visites médicales sont maintenues (visites d’embauche, d’aptitude, de reprise) à l’exception des visites périodiques.

 

Toutes les visites peuvent être effectuées en téléconsultation en accord avec le salarié. Ici encore on ne sait pas quelles activités seront considérées comme essentielles à la continuité de la vie de la Nation.

 

-Comités sociaux et économiques. La loi prévoit de modifier les modalités d’information et deconsultation des instances représentatives du personnel, notamment du CSE, pour leur permettre d’émettre les avis requis dans les délais impartis. Il serait envisagé de systématiser le recours à la visioconférence pour la consultation du CSE, au-delà de la limitation à 3 réunions par an qui existe aujourd’hui.

 

Il est certainement utile d’adapter les modalités d’information et consultation des représentants du personnel afin de leur permettre d’exercer effectivement leurs attributionspendant cette crise sanitaire. Il faut néanmoins rester vigilant à ce que ces modalitéspermettent effectivement d’assurer un contrôle sur les décisions patronales.

 

La loi prévoit également la suspension des processus électoraux des comités sociaux et économiques en cours. Il semble que ce serait une faculté laissée à l’employeur. Vu les difficultés auxquelles sont confrontées les salariés et les syndicats, il vaut certainement mieux reporter les élections.


Cependant, on espère que la prorogation des mandats des anciens élus sera bien prévue, mais surtout cela pose un problème pour les entreprises qui n’ont pas encore d’élus (franchissement des seuils) et qui constituent surement une grande partie des cas puisque dans beaucoup d’entreprises les mandats viennent de commencer ou sont récents (en raison de l’instauration du CSE qui devait être mis en place au plus tard dans toutes les entreprises au 31 décembre 2019).

 

-Formation professionnelle. La loi prévoit d’aménager les dispositions de la sixième partie du code du travail, notamment afin de permettre aux employeurs, aux organismes de formation et aux opérateurs de satisfaire aux obligations légales en matière de qualité et d’enregistrement des certifications et habilitations ainsi que d’adapter les conditions de rémunérations et deversement des cotisations sociales des stagiaires de la formation professionnelle.

 

-Assurances chômages. La loi prévoit d’adapter, à titre exceptionnel, les modalités de détermination des durées d’attribution des revenus de remplacement des chômeurs. Le gouvernement envisage de prolonger les droits des demandeurs d’emploi arrivant au bout de leur indemnisation au cours de la période de confinement.

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